Une maison d'édition c'est une identité
Il y a dans une maison une « magie qui tient de l’irrationnel », explique Olivier Nora. C’est avec humour qu’il nous décrit l’ambiance explosive qui peut exister au sein de la maison d'édition Fayard-Grasset regroupant une multitude d’auteurs, lui conférant ainsi une identité propre. « Une maison d’édition c’est un agglomérant de personnalités très fortes, quand l’un t’annonce qu’il démissionne si tu ne publies pas un livre, l’autre te menace de démissionner si tu le publies ». Il faut donc « jouer l’homme-orchestre » lorsqu’on est directeur de ces grandes maisons. Autre regard proposé par la maison Losfeld, moins ambitieuse par sa taille, ne comprenant que trois personnes et pour laquelle « il est donc difficile d’avoir beaucoup de tensions internes ». Joëlle Losfeld explique « qu’une maison n’est pas une marque, mais une couleur ». Il faut donc œuvrer à ne pas se confondre avec les autres maisons et garder son identité particulière. Enfin, Dominique Bordes fondateur de la maison Monsieur Toussaint Louverture — qui connait un grand succès auprès des critiques littéraires — exprime sa conception de l’éditeur qui « devient invisible », « qui est le seul à décider mais le collectif éditorial doit l'orienter ». L’auteur qui cherche à se faire publier doit bien saisir les diverses identités des maisons d’édition afin de trouver celle qui correspond à son écriture. Ainsi, si l’on veut se faire publier, il faut d’abord faire un tour en librairie afin de saisir les identités propres de chaque maison d’édition et rechercher celle qui nous correspond.
Un secteur en crise
Si le secteur de l’édition est en crise aujourd’hui, c’est qu’il est confronté à l’inflation éditoriale. En effet, ce milieu est « le seul qui répond à la diminution de la demande par une augmentation de l’offre ». On parle alors de « bulle éditoriale » : on place sur le marché plus de livres qu’il n’y a de lecteurs. L’enjeu principal est de relancer la demande, de redonner le goût de la lecture à un public qui se réduit de plus en plus. Le numérique ne constitue pas une menace directe pour les maisons d’édition, seul le support change. Avec une grande déplaisance pour certaines plateformes de distribution numérique, les trois éditeurs sont tous du même avis : « il faut sauvegarder les librairies, lieux de vies et de richesses ».
Pour conclure ce débat animé, rappelons que toutes les maisons d’édition désirent sauvegarder une identité propre et particulière. Le milieu de l’édition est en crise car les lecteurs ne sont plus aussi nombreux qu’avant. Les éditeurs sont appelés à faire preuve de créativité pour redonner le goût de lire afin de relancer la demande. Enfin, rappelons qu’au terme de ce débat, le numérique ne constitue pas une menace directe pour l’édition mais il dérange car il met à mal les librairies considérées comme des prescripteurs de premier plan, mais aussi des lieux de rencontres pour les lecteurs, auteurs, et éditeurs.
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P.H.