
Concrètement, Apple est accusé d’avoir suggéré aux éditeurs de préférer le contrat d’agence (dans lequel ils gardent la maitrise totale du prix de vente de leurs livres et reversent un pourcentage du prix de vente au libraire) au détriment du contrat de revendeur (dans lequel c’est le libraire qui fixe le prix et reverse un montant convenu à l’avance, indépendant du prix de vente) qui avait l’avantage de permettre la vente à perte. La stratégie d’Apple a évidemment rapidement été considérée comme une stratégie permettant une augmentation systématique des prix des ebooks. Rapidement dénoncés, les éditeurs et Apple se sont retrouvés sur la sellette. Face à la pression de l’administration américaine, tous les éditeurs incriminés ont préféré faire profil bas et ont accepté d’éviter le procès en payant un montant de 146 millions de dollars, une pacotille par rapport aux dommages et intérêts qu’Apple risque de devoir payer.
À nos yeux, la condamnation d’Apple est compréhensible sur le plan de l’entente sur les prix. Néanmoins, on est en droit de se demander à quoi ressemblerait ce marché si Apple n’avait pas été présent. En effet la décision rendue par Amazon pose néanmoins question à bien des égards pour ceux qui connaissent la structure du marché américain du livre numérique. En effet, en 2010 lorsqu’Apple a lancé son iPad, Amazon régnait en maitre avec une part de marché avoisinant les 90 % et le marché était proche du monopole. L’arrivée d’Apple a ravivé le marché et dynamisé la concurrence, ce qui ne peut qu’être bénéfique pour les lecteurs de livres numériques. D’ailleurs, à cet égard, il est amusant de remarquer qu’Apple s’est rapidement imposé comme un acteur prédominant sur de nombreux marchés, notamment en Europe.
Le plus étonnant dans cette histoire c’est que les plus grands bénéficiaires de cette affaire sont les lecteurs numériques européens. Apple a eu le mérite de déstabiliser Amazon sur son propre marché et de créer une réelle concurrence. Cette société occupe clairement une place de leader au niveau de l’innovation, notamment avec l’iPad et l’iPad mini. Les chiffres viennent en tous les cas confirmer cette perspective puisque depuis le lancement de l’iPad et des accords entre Apple et les éditeurs, la part de marché du géant de Seattle a diminué de 90% à 60% alors qu’Apple revendique actuellement une part d’environ 20%. Un chiffre contesté par les analystes qui pensent qu’elle est plus proche des 10%.
Reste à voir qui sera le gagnant final de cette histoire puisque le procès a permis à Amazon de mettre un terme au contrat d’agence et de réimposer son contrat de revendeur. Cette stratégie lui permet de vendre à perte et donc d’être très agressif par rapport à ses concurrents. Entretemps, d’autres acteurs tels que Kobo et Barnes & Noble sont entrés dans course et ont pu s’imposer pour le plus grand bénéfice des lecteurs numériques.
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T.L.